Absorption de la société mère : Mécanismes et considérations juridiques et fiscales

L’absorption de la société mère par une autre entité dans un groupe corporate est une opération complexe qui nécessite une compréhension approfondie des dispositifs législatifs et fiscaux en place pour être exécutée efficacement. Le dispositif prévu à l’article 223 L, 6-c du Code Général des Impôts (CGI) facilite ces opérations en maintenant l’application du régime de groupe, ce qui est crucial pour les restructurations internes et les consolidations de groupes. 

 

I) Principes et mécanismes de l’absorption d’une Société Mère

 

Les opérations de fusion-absorption impliquant une société mère se définissent par la transmission de l’intégralité du patrimoine de la société absorbée à la société absorbante. Cette dernière peut être déjà existante ou constituée à cet effet. Les actionnaires de la société dissoute reçoivent en compensation des titres de la société absorbante et, potentiellement, une soulte limitée à 10 % de la valeur nominale de ces titres. Il est crucial de noter que toute opération ayant pour but ou résultant en fraude fiscale est exclue du bénéfice de ces dispositions, conformément à l’article 210-0 A, III du CGI. 

 

A) Exigences spécifiques pour la dissolution sans liquidation 

 

Une particularité notable du dispositif est l’option pour une société devenue propriétaire à 100 % d’une société mère intégrante de procéder à sa dissolution sans liquidation. Cette démarche doit être approuvée par l’administration fiscale et la fusion doit être effectuée rétroactivement dès le premier jour de l’exercice fiscal de la société dissoute. Cela suppose une intégration complète du patrimoine au cours de l’exercice fiscal de l’acquisition, faute de quoi d’autres règles pourraient s’appliquer. 

 

Le régime spécial des fusions, tel que décrit dans l’article 210 A du CGI, ainsi que le régime de droit commun sont tous deux compatibles avec le dispositif de l’article 223 L, 6-c. Toutefois, si une société mère est absorbée sous le régime spécial par une autre société de son groupe optant pour un régime de groupe, la continuité du groupe existant doit être maintenue, sans cessation ni création de nouveau groupe, selon les règles de l’article 223 S du CGI. 

 

b) Situation de la société absorbante

 

La société absorbante doit être assujettie à l’impôt sur les sociétés et capable d’opter pour le régime de groupe. Elle peut être une filiale du groupe fiscal de la société absorbée, ou une entité extérieure ayant potentiellement le statut de société mère intégrante. La gestion des actifs apportés doit être réalisée selon les principes comptables en vigueur, avec une transcription basée sur les valeurs comptables en cas de contrôle commun, ou sur les valeurs réelles si les contrôles sont distincts. 

 

c) Cas de sociétés étrangères et intégration fiscale

 

Lorsque la société absorbante est établie à l’étranger, elle doit créer un établissement stable en France avant de pouvoir bénéficier du régime de groupe français. Les opérations impliquant une transmission universelle du patrimoine à une société étrangère nécessitent que cette dernière intègre les filiales dans un groupe fiscal dès l’ouverture de l’exercice en cours, pourvu que les conditions de rétroactivité soient remplies. 

 

Le CGI permet également à une société absorbant la société mère dans le cadre d’une intégration horizontale de former un nouveau groupe horizontal ou vertical, si les conditions sont réunies avant ou à cause de la fusion. Il est essentiel de noter que la cessation du groupe n’est pas applicable si la fusion est réalisée sous le régime spécial et que l’option pour un régime d’intégration fiscale est exercée. 

 

II) Gestion des réintégrations et implications fiscales lors de la cessation d’un groupe

 

La cessation d’un groupe fiscal à la suite d’une absorption nécessite une gestion minutieuse des aspects comptables et fiscaux, notamment en ce qui concerne les réintégrations liées à la cessation de l’ancien groupe. Ces réintégrations sont essentielles pour assurer la conformité fiscale et optimiser les implications fiscales de la société absorbante. 

 

a) Réintégrations à la clôture de l’exercice 

 

Lorsque la fusion est effective, la société absorbante doit réintégrer dans ses comptes les plus-values ou moins-values qui avaient été neutralisées lors de transactions antérieures entre les sociétés du groupe. Ces réintégrations incluent notamment les plus-values sur des cessions d’immobilisations ou de titres, qui doivent être rapportées à la plus-value nette à long terme de l’exercice de réalisation de la fusion. 

 

Traitement fiscal des plus-values de titres de participation : Les plus-values sur des titres de participation, définies par l’article 219, I-a quinquies du CGI, sont réintégrées sans incidence fiscale immédiate, à moins que la plus-value à long terme n’ait été réalisée dans un exercice ouvert avant 2019. Dans ce cas, une quote-part de frais et charges de 12% du montant brut doit être incluse dans le résultat taxable. 

 

– Gestion des cessions de titres d’immobilier : Les plus-values issues de cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière cotées ou non, sont traitées différemment selon la date de l’exercice de clôture. Les taux applicables varient de 15% à 19% selon la période de la cession. 

 

b) Imputation du déficit d’ensemble sur les réintégrations de sortie

 

La société absorbante peut utiliser le déficit ou la moins-value à long terme du groupe dissous pour contrebalancer les réintégrations de sortie, conformément à l’article 223 L, 6-c du CGI. Cette imputation aide à réduire ou annuler les charges fiscales résultant des réintégrations. 

 

– Conditions d’utilisation des déficits : Les déficits reportables peuvent être utilisés sans être soumis à la règle de plafonnement habituelle des déficits. Ceux-ci doivent uniquement servir à compenser les réintégrations directement liées à la cessation du groupe. 

 

– Documentation et déclarations : Les montants des réintégrations et des déficits utilisés doivent être clairement indiqués dans les déclarations fiscales appropriées, permettant ainsi une transparence et une traçabilité des ajustements fiscaux. 

 

c) Exemple pratique

 

Considérons le cas de la société M, absorbée par la société H avec effet rétroactif. À la clôture de l’exercice précédent, le déficit reportable est de 1 500 000 €, et les réintégrations liées à la cessation du groupe s’élèvent à 1 400 000 €. La société H peut utiliser ce déficit pour neutraliser entièrement les réintégrations de sortie, résultant en un ajustement net de 0 € dans son résultat fiscal de l’année de fusion, tout en laissant un excédent de déficit de 100 000 €, transférable sous conditions. 

 

 

 

Pour maîtriser les mécanismes des fusions et acquisitions, et en particulier l’absorption de la société mère, un accompagnement spécialisé est essentiel. Nous recommandons fortement l’intervention d’un commissaire à la fusion pour assurer une transition efficace et conforme aux exigences juridiques et fiscales.  

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