Lorsqu’une entreprise se trouve sur le chemin d’une refonte de sa structure juridique, chaque étape de cette transformation représente une importance cruciale. Cette transition implique de se confronter aux effets significatifs que cette transformation aura sur l’entreprise, ses activités, ses relations contractuelles, et sa position vis-à-vis des tiers. C’est dans ce contexte complexe et réglementé que la diligence requise dans les contrôles du commissaire aux comptes et dans la mise en œuvre des formalités de publicité revêt une importance primordiale.
I. Publicité de la transformation de la société
Dans le cadre de la transformation d’une société, les formalités de publicité consignées rigoureusement, assurent sa reconnaissance et son opposabilité aux tiers. La procédure de publicité, se divise en plusieurs étapes, chacune définissant les contours légaux de cette transition.
Premièrement, l’annonce légale de cette mutation doit être insérée dans un support spécifique dédié aux annonces légales, conformément à l’article R 210-9 du Code de commerce.
En parallèle, une inscription modificative doit être effectuée au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS) ainsi qu’au Registre National des Entreprises (RNE) par le biais du guichet unique électronique des formalités d’entreprises. Cette démarche requiert la présentation des pièces justificatives concernant la transformation de la société.
Une autre composante essentielle de cette publicité réside dans son insertion au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (Bodacc), sous la supervision du greffier du tribunal de commerce, selon les dispositions de l’article R 123-159 et R 123-161 du Code de commerce. Cette publication renforce la diffusion de cette transformation dans le domaine public.
Par ailleurs, l’inscription modificative au registre des bénéficiaires effectifs de la société, via le guichet unique, conformément à l’article R 561-55 du Code monétaire et financier, parachève cette démarche de publicité. Cette multiplicité de démarches vise à garantir une diffusion exhaustive de la transformation, offrant ainsi une lisibilité totale à l’égard des tiers et de l’administration.
Cependant, l’omission ou le défaut de publicité d’une telle transformation peut entraîner l’inopposabilité de cette transformation à l’administration fiscale.
Outre ces formalités générales, certaines spécificités s’imposent selon le type de transformation envisagé. Par exemple, lors d’une transformation en société par actions d’une entité non pourvue d’un commissaire aux comptes, le dépôt au greffe du tribunal d’un rapport des commissaires chargés d’évaluer la valeur des actifs sociaux s’avère nécessaire. Ce rapport doit être annexé au RCS, conformément à l’article R 123-105, alinéa 3 du Code de commerce, bien que son absence ne constitue pas en soi un motif de refus d’inscription de la transformation, comme le souligne l’Avis CCRCS 2016-016 du 15 septembre 2016.
Enfin, des obligations supplémentaires de publicité s’imposent en cas de modification de dénomination sociale ou de détention de biens immobiliers, exigeant la publication de la transformation auprès du service chargé de la publicité foncière et des registres nationaux de brevets ou de marques, le cas échéant.
Le rapport des commissaires évaluant la valeur des biens composant l’actif social, requiert également un dépôt en annexe au Registre National des Entreprises, via le guichet unique électronique des formalités d’entreprises.,
Cette diversité de démarches et de publications atteste de l’ampleur et de la rigueur requises pour rendre cette transformation transparente et opposable à tous.
II. Effets de la transformation
La transformation d’une société, bien qu’elle implique des changements significatifs dans sa structure ou sa forme juridique, ne crée pas une personne morale nouvelle. Elle représente plutôt une évolution interne, un changement dans sa forme juridique tout en conservant son identité et sa personnalité morale.
Effets temporels et opposabilité : La transformation prend effet dès sa décision par les organes compétents de la société. Cependant, pour qu’elle soit opposable aux tiers tels que les créanciers ou les partenaires contractuels, elle doit passer par un processus de publicité rigoureux. Sans ces formalités de publicité, la transformation reste inopposable, ne modifiant pas les relations existantes avec les tiers.
Continuité de la personnalité morale : L’un des principaux effets de la transformation est la préservation de la personnalité morale de la société. Cela signifie que la société transformée ne devient pas une entité nouvelle, mais plutôt une continuité de l’entité précédente. Elle conserve son patrimoine, ses droits, ses obligations, ainsi que ses responsabilités. Les actions entreprises par la société avant la transformation restent valables et effectives sous sa nouvelle forme, assurant ainsi la continuité des relations contractuelles, des droits de propriété et des engagements antérieurs.
Conséquences juridiques et capacité d’agir en justice : La transformation n’entrave pas la capacité de la société à agir en justice. Même si elle est irrégulière ou si une erreur est commise lors de l’indication de l’ancienne forme sociale dans des actions en justice, cela ne conduit pas nécessairement à la nullité de ces actions. Cependant, toute erreur de ce type pourrait entraîner l’annulation des actions si elle cause un préjudice à la partie adverse. En substance, cela souligne que les erreurs de forme ne privent pas la société de sa capacité à agir en justice, à moins que ces erreurs ne portent préjudice à autrui.
Transformation avec d’autres modifications statutaires : La transformation peut être accompagnée d’autres changements statutaires, tels que le changement de dénomination sociale ou le transfert de siège social. Ces modifications additionnelles ne remettent pas en cause la continuité de la personnalité morale de la société, pourvu que la transformation reste régulière.
Implications comptables et documentaires : Sur le plan comptable, en cas de transformation en cours d’exercice, les comptes peuvent être arrêtés à la fin de l’exercice comptable en cours, sauf si les associés décident différemment. Les documents sociaux, tels que les procès-verbaux des assemblées, peuvent être consignés dans le registre utilisé avant la transformation, car les formalités relatives à ces documents demeurent inchangées, quel que soit le type de société.
Cette refonte de la structure juridique d’une entreprise représente une transformation complexe qui exige une conformité scrupuleuse avec les réglementations en vigueur. Parallèlement aux contrôles effectués par les commissaires aux comptes pour évaluer la valeur des actifs sociaux, la publicité de cette transformation joue un rôle crucial. Cette publicité, déclinée en une série d’étapes précises, vise à rendre cette transformation transparente et opposable aux tiers. Ce processus minutieux est nécessaire pour garantir la légalité et la validité de cette transformation, tout en assurant une transition fluide pour l’entreprise.