Le partage intervient généralement après la clôture de la liquidation et peut englober divers éléments tels que l’actif restant, le passif résiduel après la réalisation totale de l’actif, ainsi que les actifs non réalisés et les dettes sociales non encore réglées à la clôture de la liquidation.
En principe, une fois la liquidation achevée, il ne devrait plus rester d’actifs non réalisés ni de dettes sociales impayées. La liquidation vise à réaliser l’actif social pour éteindre les dettes sociales. Cependant, il est envisageable, bien que rare, que les associés décident de clôturer la liquidation par anticipation, procédant ainsi à un partage définitif de l’actif et du passif subsistant à cette date. Ce partage est valable entre les associés mais demeure inopposable aux créanciers sociaux, qui conservent le droit de demander la réouverture de la liquidation.
I. Les modalités de mise en œuvre du partage
Le Code de commerce ne contient qu’un seul article explicitement dédié au partage, l’article L 237-29, fixant les droits des associés relatifs au boni de liquidation. Pour les autres aspects du régime du partage, il convient de se référer aux dispositions de l’article 1844-9 du Code civil, qui renvoient notamment aux règles applicables au partage des successions.
A) L’application des règles relatives à l’indivision
La demande en partage peut être initiée dès la clôture de la liquidation, marquant ainsi le début de l’indivision post-sociale. Cependant, le partage peut être différé soit par décision de justice, soit par accord entre les indivisaires.
Lorsque les associés ne provoquent pas le partage, ils demeurent dans l’indivision pour tout ou partie des biens sociaux. A ce titre, leurs rapports sont régis par les dispositions relatives à l’indivision. Toutefois, ce maintien dans l’indivision est précaire, car selon l’article 815 du Code civil, « nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué ».
La poursuite du maintien dans l’indivision peut être suspendue soit par décision de justice, notamment en cas de risque de préjudice à la valeur des biens indivis, soit par convention, dont la durée ne peut excéder cinq ans, renouvelable par décision expresse des parties.
Bien que le consentement unanime des indivisaires soit généralement requis pour les actes relatifs aux biens indivis, des exceptions sont prévues, permettant notamment à tout indivisaire de prendre des mesures nécessaires à la conservation des biens indivis. En outre, certaines mesures judiciaires autorisent la représentation d’un indivisaire hors d’état de manifester sa volonté ou la possibilité de passer outre au refus d’un indivisaire lorsque ce refus met en péril l’intérêt commun des indivisaires.
Pour l’indivision conventionnelle, les articles 1873-5 à 1873-11 du Code civil établissent les règles relatives à la nomination et la révocation des gérants, la détermination de leurs pouvoirs, ainsi que les conditions permettant aux indivisaires d’écarter la règle de l’unanimité pour certaines décisions.
B) Les formes de réalisation du partage
Le partage est principalement amiable, devenant judiciaire uniquement en l’absence d’accord entre les associés. En présence de mineurs sous administration légale, le partage amiable doit être approuvé par le parent exerçant seul l’autorité parentale ou par les deux parents agissants conjointement, sauf nomination d’un administrateur ad hoc par le juge en cas d’opposition d’intérêts.
Lorsque des immeubles sont à partager, l’acte de partage doit revêtir la forme authentique. De même, si des parts de SARL ou des actions soumises à agrément sont incluses parmi les éléments à partager, l’associé attributaire doit obtenir l’agrément conformément aux conditions fixées par la société émettrice.
Le partage se réalise initialement en espèces, mais peut également être effectué en nature, sous réserve de conditions statutaires spécifiques. Une clause statutaire contraire peut autoriser un partage en nature lorsque les éléments à partager le permettent et que cela s’avère opportun. Notamment, en cas de partage en nature avec soulte, les modalités de paiement peuvent varier en fonction de l’évolution de la valeur des biens depuis le partage, sauf accord contraire entre les parties.
C) La réalisation des opérations de partage
Les opérations de partage ont pour objectif de déterminer la part de chaque associé dans les valeurs actives et passives issues du compte définitif de liquidation. Cependant, ces opérations peuvent être écartées dans trois situations spécifiques :
– Attribution conventionnelle des biens à partager : Les associés peuvent convenir, soit dans les statuts, soit par une décision distincte, de l’attribution spécifique de certains biens à certains associés.
– Reprise d’apports après la liquidation : Si un bien apporté à la société se retrouve dans la masse à partager et qu’aucune attribution conventionnelle n’a été prévue, l’apporteur peut demander la restitution de son apport. Cette reprise s’accompagne du versement d’une soulte aux coassociés sous certaines conditions.
Attribution préférentielle légale des biens à partager : L’attribution préférentielle des biens sociaux peut être demandée dans les mêmes conditions que pour les successions indivises. Cependant, elle ne peut être exercée si le bien en question a déjà fait l’objet d’une reprise d’apport.
Concernant le remboursement du capital social, si l’actif est entièrement réalisé et le passif réglé, il ne reste à partager entre les associés seulement la somme d’argent disponible, représentant la valeur nominale des droits sociaux non amortis qu’ils détiennent…
Répartition du boni de liquidation
Les droits des associés dans le boni de liquidation, sauf disposition contraire des statuts, sont généralement répartis en proportion de leurs droits dans le capital. Les associés peuvent toutefois convenir de répartir le boni selon des proportions différentes. La renonciation de certains associés à tout droit dans le boni est licite, tant que cela ne constitue pas une clause léonine.
Contribution aux pertes
Si le passif excède l’actif, les associés solidairement responsables des dettes doivent désintéresser les créanciers impayés. Si le passif est inférieur à l’actif mais que le capital est entamé, le surplus d’actif est partagé entre les associés selon les statuts ou, à défaut, en proportion de leur part dans le capital. Les associés à responsabilité limitée ne sont tenus des dettes impayées qu’à concurrence de leurs apports. Après la clôture de la liquidation, l’ancien associé peut être tenu de rembourser les créanciers sociaux non désintéressés pour toute somme qu’il aurait indûment perçue lors du partage.
II. Effets, garantie et sanctions du partage
A) Sanctions du partage
Nullité du partage de la société
Le partage de la société peut être annulé, comme dans le cas des successions, pour des motifs tels que le vice de forme (partage amiable au lieu d’un partage judiciaire) ou l’incapacité d’un copartageant. Il peut également être annulé en cas de violence, dol, ou erreur portant sur l’existence ou la quotité des droits des copartageants ou sur la propriété des biens partageables. En cas de vice, le tribunal peut ordonner un partage complémentaire ou rectificatif si les conséquences peuvent être réparées autrement que par l’annulation.
Les créanciers peuvent demander la nullité d’un partage frauduleux dans les cinq ans suivant son occurrence, en vertu de l’action paulienne.
Partage lésionnaire de la société
En cas de partage lésionnaire de plus du quart, un complément de part est fourni à l’associé lésé, soit en numéraire, soit en nature, au choix des autres associés. Cependant, cette action n’est plus possible après une transaction post-partage.
B) Régime Fiscal du Partage
L’acte constatant la dissolution n’est pas soumis à l’enregistrement. Les ventes de biens pendant la liquidation sont réputées faites par la société elle-même et sont soumises aux droits de vente. L’acte de partage donne généralement lieu à un droit proportionnel de 2,50 % sur l’intégralité de l’actif net partagé, avec des règles spécifiques pour les biens bénéficiant du régime fiscal de faveur.
La dissolution de la société est assimilée à une cessation d’entreprise sur le plan des impôts directs. Les bénéfices et plus-values non encore taxés sont imposés entre les mains des associés. Le boni de liquidation est imposé comme un revenu distribué, bénéficiant éventuellement d’exonérations selon le statut des associés et les modalités de l’option fiscale.
C) Exemple de calcul du boni de liquidation
Le boni de liquidation, souvent désigné sous le terme anglais « liquidation surplus », représente la valeur résiduelle des actifs d’une entreprise après le règlement de ses dettes et obligations. Ce montant résiduel est ensuite redistribué aux actionnaires, proportionnellement à leur participation dans la société.
Le calcul du boni de liquidation peut être formulé de manière concise :
{Boni de Liquidation} = {Capitaux Propres} – {Capital Social}
Exemple illustratif :
Considérons une entreprise fictive, ABC Manufacturing, qui présente les éléments financiers suivants :
- Capitaux Propres : 2 500 000 €
- Capital Social : 1 800 000 €
Le calcul du boni de liquidation serait donc :
{Boni de Liquidation} = 2 500 000 € – 1 800 000 € = 700 000 €
Dans ce scénario, le boni de liquidation s’élève à 700 000 €. Ce montant représente la réserve financière disponible après le remboursement des dettes de l’entreprise. Il peut être distribué aux actionnaires conformément à leurs parts respectives dans le capital social.
Implications pratiques :
La compréhension du boni de liquidation revêt une importance cruciale pour les dirigeants d’entreprise, les investisseurs et les parties prenantes. Elle permet de prendre des décisions éclairées lors de la dissolution ou de la restructuration d’une société, en assurant une distribution équitable des actifs restants.
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En résumé, le partage au sein des sociétés commerciales, intervenant après la clôture de la liquidation, est un processus complexe régi par des règles légales spécifiques. De la réglementation à la mise en œuvre, de la gestion des biens indivis aux différentes formes de partage, chaque étape nécessite une attention particulière.
Le maintien possible de l’indivision offre une option aux associés, bien que précaire, et les opérations de partage sont encadrées par des règles strictes, avec des exceptions à prendre en compte.
En tant que commissaires aux comptes, nous sommes prêts à vous accompagner dans ce processus complexe. N’hésitez pas à nous contacter pour un soutien personnalisé et des conseils avisés.